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« Le chien jaune de Mongolie » dans la filmographie de Byambasuren Davaa

Pour cette courte présentation, on se contentera d’évoquer les éléments biographiques susceptibles d’éclairer la compréhension du film Le Chien jaune de Mongolie (2005), et plus largement, de la filmographie de la cinéaste.
Byambasuren Davaa vêtue d’un deel (vêtement traditionnel mongol)
Byambasuren Davaa est née en 1971 à Oulan-Bator, la capitale de la Mongolie, où elle a vécu en habitat fixe, ses parents étant sédentaires. Néanmoins, elle connaît bien le mode de vie nomade car elle passait ses étés chez ses grands-parents dans les steppes mongoles — décor naturel du film Le Chien jaune de Mongolie.
En 1999, elle part pour l’Allemagne, à l’école de cinéma de Munich pour rejoindre la section documentaire et journalisme télévision, où elle découvre un nouveau mode de vie. Paradoxalement, c’est loin de chez elle, depuis l’Occident, qu’elle renoue intimement avec son pays natal (c’est donc aussi depuis sa découverte de l’Occident qu’elle nous adresse ce film). Elle souhaite désormais filmer, documenter le mode de vie traditionnel nomade en Mongolie, voué à disparaître, pour en garder l’empreinte. Sa filmographie l’atteste, que l’on peut parcourir brièvement.

Filmographie : des films à la lisière entre le documentaire et la fiction

L’Histoire du chameau qui pleure (2006), son film de fin d’études, coréalisé avec Luigi Falorni, est tourné en décors réels dans le désert de Gobi. Il raconte le quotidien d’une famille de nomades, aidant les chamelles du troupeau à mettre bas. Mais l’une d’elle y parvient difficilement. Dès la naissance, elle se désintéresse de son bébé et lui refuse son lait. Afin d’émouvoir la chamelle et la réconcilier avec son bébé chameau, la famille fait venir un violoniste, selon une longue tradition.
Ce film est nommé aux Oscars 2005 dans la catégorie du meilleur documentaire
Deux ans plus tard, Byambasuren Davaa retourne dans son pays natal pour filmer la vie de nomades vivant dans les steppes, au Nord de la Mongolie, dans Le Chien jaune de Mongolie (2005). L’intrigue est simple, épurée et poétique : Nansal, une fillette de six ans, curieuse, courageuse, l’aînée de la famille, découvre un jour un chien abandonné dans une grotte, et décide de le ramener chez elle. Mais son père veut qu’elle s’en débarrasse car il craint que le chien ait été en contact avec des loups, ce qui constituerait une menace pour son troupeau de moutons. Nansal tente de cacher celui qu’elle a surnommé « Tatoué », mais le jour où la famille déménage, elle doit abandonner le chien…
Le film est tourné en décors réels, avec des personnages qui sont des non-professionnels : la famille Batchuluun
Les Deux chevaux de Gengis Khan (2011), c’est un voyage musical autour du retour de la chanteuse Urma sur la terre de ses ancêtres, en Mongolie, où elle est venue faire réparer l’ancien violon à tête de cheval de sa grand-mère, et retrouver les versets d’une vieille chanson intitulée « Les Deux chevaux de Gengis Khan ».
Le film est sélectionné dans plus de trente festivals
Les Racines du monde (2020) se passe en Mongolie et met en scène le combat du dernier chef des nomades, le père d’Amra, qui s’oppose aux sociétés minières recherchant de l’or dans les steppes. Mais le père meurt dans un tragique accident. Son fils qui n’a que douze ans entreprend de continuer son combat…
Plusieurs éléments se dégagent de cette filmographie. D’une part, on peut identifier des thèmes constants du cinéma de Byambasuren Davaa, révélateurs de son désir de préserver l’identité culturelle des peuples mongols : le nomadisme, la nature, la coexistence entre la tradition et la modernité, les liens familiaux, l’animalité, la musique, etc.
D’autre part, on peut noter l’emploi d’une même forme pour soutenir son propos : un cinéma à la lisière du documentaire et de la fiction, où la représentation du réel et les ressorts fictifs sont articulés pour sensibiliser le public, ce qui est original (voir cette anecdote intéressante sur l’opposition entre documentaire et fiction : upopi.ciclic.fr/voir/cartes-blanches/c-est-quoi-le-documentaire).
Ses productions s’inscrivent donc dans la filiation des films de Flaherty, Cooper et Schoedsak, qui ont été une révélation pour elle : « J’ai été bercée par les contes et récits traditionnels et lorsque j’ai grandi, j’ai été confrontée à la censure du monde cinématographique. En arrivant à Munich, j’ai découvert une petite partie du cinéma mondial et cela a suffi à me bouleverser et à me surprendre beaucoup. J’y ai découvert notamment des documentaires filmés comme des fictions, chose que je n’avais jusqu’alors jamais vue. »
Robert Flaherty, le réalisateur de Nanouk l’Esquimau (1922), est souvent considéré comme le père du « documentaire romancé ». « Nanouk fut vraiment le premier film de son genre, le premier à montrer sur les écrans des gens ordinaires, faisant des choses ordinaires, étant eux-mêmes. » (Frances Flaherty)
Plusieurs éléments se dégagent de cette filmographie. D’une part, on peut identifier des thèmes constants du cinéma de Byambasuren Davaa, révélateurs de son désir de préserver l’identité culturelle des peuples mongols : le nomadisme, la nature, la coexistence entre la tradition et la modernité, les liens familiaux, l’animalité, la musique, etc.
D’autre part, on peut noter l’emploi d’une même forme pour soutenir son propos : un cinéma à la lisière du documentaire et de la fiction, où la représentation du réel et les ressorts fictifs sont articulés pour sensibiliser le public, ce qui est original (voir cette anecdote intéressante sur l’opposition entre documentaire et fiction : upopi.ciclic.fr/voir/cartes-blanches/c-est-quoi-le-documentaire).
Ses productions s’inscrivent donc dans la filiation des films de Flaherty, Cooper et Schoedsak, qui ont été une révélation pour elle : « J’ai été bercée par les contes et récits traditionnels et lorsque j’ai grandi, j’ai été confrontée à la censure du monde cinématographique. En arrivant à Munich, j’ai découvert une petite partie du cinéma mondial et cela a suffi à me bouleverser et à me surprendre beaucoup. J’y ai découvert notamment des documentaires filmés comme des fictions, chose que je n’avais jusqu’alors jamais vue. »
Le cinéaste utilise des ressorts romanesques, scénarise des séquences avec les Inuits pour susciter l’intérêt du public.
Grass, lutte d’un peuple pour la vie (1925), documentaire mythique co-réalisé par Meriam Cooper et Ernest Schoedsack porte sur la migration d’un peuple kurde oublié, les Bakhtiar.
Finis Terrae (1928) de Jean Epstein, l’histoire de quatre pêcheurs (goémoniers) partis pour la récolte sur l’île de Bannec.