Années 1950-1960
Paradoxalement, ce sera sous la bienveillance d’Hollywood que la télévision connaîtra son premier âge d’or dès les années 1950.
Les studios américains, craignant la concurrence de ce nouveau media, vont l’investir pour mieux le contrôler. Ils vont ainsi mettre en place les bases de ce qui deviendra quelques temps plus tard la fiction télévisuelle.
Même s'ils semblent dans un premier temps, simplement s’adapter au medium sans en saisir les atouts spécifiques (l’écriture, les choix de mise en scène, le jeu des acteurs restent en lien étroit avec ce qui se faisait déjà au théâtre, à la radio et au cinéma), c’est néanmoins une période d’expérimentation qui va permettre l’émergence d’auteurs de télévision remarquables et de programmes pertinents.
En 1951 est adaptée à la télévision l’émission de radio My Favorite Husband (1948-1951) rebaptisée I love Lucy. Cette série, qui raconte l’histoire d’une femme au foyer désirant faire du music-hall, se rapproche du vaudeville ou de la comédie de boulevard.
Mais elle va marquer durablement l’imaginaire américain.
I love Lucy est la première sitcom filmée dans un studio hollywoodien avec trois caméras (une pour les plans larges, une deuxième pour le locuteur et la dernière pour le destinataire). Elle est tournée en public et les réactions de celui-ci sont gardées. Les décors ressemblent beaucoup à des scènes de théâtre.
Le "quatrième mur" (et donc la caméra) se retrouve ainsi, comme dans une salle de spectacle, à la place spectateur et représente l’écran de télévision.
A partir des années 1960, on note l’apparition de comédies qui s’éloignent des conventions en se rapprochant du cinéma.
Celles-ci sont appelées single-camera comedies puisqu’elles ne mettent en jeu qu’une seule caméra mais qui à la possibilité d’effectuer des mouvements. Les méthodes de tournage vont s’en trouver modifiées : le tournage en extérieur, ou dans des décors complexes, devient possible.
Le montage et la post-production deviennent une étape cruciale dans l’aspect final de la série.
L’influence du cinéma s’amplifie puisqu’en 1955 une série policière majeure fait son apparition : Alfred Hitchcock Presents (1955-1965).
Le réalisateur y fait de courtes apparitions en début et fin d’épisodes pour présenter le sujet du jour.
Cette série est une anthologie, c’est-à-dire qu’elle ne possède pas de personnages récurrents, ni d’arc narratif déployé sur plusieurs épisodes. La structure de la série repose sur cette présentation par Hitchcock et les thèmes policiers qui y sont développés.
Alfred Hitchcock Presents est une des premières séries à faire appel à de grands metteurs en scène comme Robert Altman ou Hitchcock lui-même, et à adapter des nouvelles d’auteurs reconnus tels H.G. Wells, Ray Bradbury ou Roald Dahl.
On note ainsi que cette première série d’anthologie possède déjà de grandes qualités scénaristiques et cinématographiques sur lesquelles vont se greffer ses héritières directes ou indirectes.
Par ailleurs, c’est à cette époque que va naître un autre genre majeur de la fiction télévisuelle: le fantastique. Celui-ci va se développer tout d’abord à travers une autre série d’anthologie : La Quatrième dimension (The Twilight Zone, 1959-1964).
Les scénarii de cette fiction n’ont pas excessivement vieilli et restent, pour la plupart, d’actualité. Ils parviennent à impliquer le spectateur en lui présentant des personnages ordinaires, et donc proches de lui, confrontés au surnaturel et à l’étrange. Les chutes finales sont toujours surprenantes.
On notera ici l'importance accordée à son créateur, Rod Serling, qui encadrait chaque histoire à la manière d'un narrateur-démiurge, reprenant ainsi les principes développés dans le feuilleton radiophonique.
Les épisodes marquants sont l’œuvre d’auteurs américains significatifs du genre comme Richard Matheson ou encore Charles Beaumont.
La série se trouve en concurrence directe avec Alfred Hitchcok Presents, passée sur une autre chaîne, et parviendra à se maintenir pendant cinq saisons.
Elle donnera naissance à deux « suites » en 1985 (The New Twilight Zone, 1985-1989) et 2003 (La Treizième dimension ou The Twilight Zone, 2002-2003), et une toute récente, diffusée depuis le 30 mars 2019 sur CBS.