Cette séquence introduit l’histoire de l’homme sur l’île — ou plutôt, avec l’île. Il explore cette dernière, individu esseulé et fragile face à un espace gigantesque. À l’absence flagrante de toute vie humaine, le film répond par la présence monumentale de la nature.
C’est donc la nature qui prévaut sur l’individu, tantôt enveloppante, tantôt écrasante. Très vite, on découvrira que l’homme en vient à faire corps avec l’île. On le devine dès cette première séquence où les deux personnages — l’homme et l’île — sont réunis. C’est la nature qui anime l’homme, qui le guide et l’oriente : un crabe le réveille, un amas d’algues à la forme trompeuse l’attire plus loin sur la plage, le cri d’un phoque le pousse sur les rochers… lui se laisse happer par ce décor qui l’englobe. À cet égard, l’image du naufragé s’immergeant dans la forêt de bambous est éloquente. Même le reflet sombre de l’île dans l’océan appelle l’analogie avec le corps de l’homme, dont l’ombre portée sur le décor sera un motif récurrent du film.
Omniprésente, la nature l’est à l’image comme dans la bande-son. Ses bruits sont variés et occupent tout l’espace sonore : le souffle du vent, le fracas de la pluie, le cri des animaux… Le naufragé, lui, est presque réduit au silence. Et quand il s’exprime, sa voix se perd dans l’immensité de l’océan.
(À propose de la bande-son, une seconde séquence du film est analysée dans le parcours « Musique et Cinéma » dans
La musique narative )